Il y aurait-il des domaines de la réflexion humaine qui échapperaient à la cohésion, à la rigueur et à la vérification, il y aurait-il un point de bascule de la zone blanche à la zone noire ?
Il y a bien sûr des monuments qui ont acquis au fil de l’histoire le label scientifique, l’astronomie en premier et la physique en général avec l’accompagnement de l’outil mathématique.
La physique est la mise en lumière des phénomènes naturels, la mise en évidence de comportements qui se reproduisent selon des lois, mais la physique c’est aussi le dépassement de l’état naturel. Il en va de même pour la chimie, la biologie et la médecine.
A certaines époques les thèses scientifiques ont été traitées comme des opinions.
Avant les lois aujourd’hui admises, une thèse en valait une autre, de nombreux chercheurs étaient dans l’erreur et ceux que nous considérons aujourd’hui comme des génies précurseurs ont pu connaître le bûcher, les uns et les autres ont contribué à l’édification des sciences toujours inachevée. Les sciences les plus « dures » font encore appel à des conjectures, des hypothèses qui restent proches de ce que sont les opinions.
Les mathématiques sont quant à elles pour une part issues de l’observation de la nature et pour une autre part le fruit de mises en œuvres logiques qui ne connaissent a priori aucune application physique … sauf un jour peut-être comme ce fut le cas pour Einstein qui ne sachant comment modéliser son intuition mit le doigt sur le modèle absolument abstrait de Riemann, avec le bonheur que l’on sait.
Le grand siècle scientifique que fut le 19ème a vu les scientifiques et les académies se contester durement notamment autour de la nature de la lumière avec des thèses qui aujourd’hui nous paraissent simplistes. Mais c’est la science en marche avec ses errements.
La biologie et la médecine ont eu bien du mal à s’affirmer comme sciences, tant la prégnance religieuse imposait une vision populaire toute en termes de créations divines. La théorie de l’évolution de Darwin, quatre siècles plus tôt aurait conduit son auteur au bûcher ou au renoncement.
Ainsi la dureté d’une science ne tient pas qu’à elle-même et à ses chercheurs, la force de groupes de pression peut la faire régresser, un pourcentage non négligeable d’établissements d’enseignement aux Etats-Unis n’ont-ils pas retiré la théorie de l’évolution darwiniste de leurs programmes au profit des thèses créationnistes ? La biologie redevient alors une simple discipline où une opinion en vaut bien une autre et rien n’assure que dans cinq siècles le créationnisme ne l’aura pas emporté.
Le travail humain d’observation, de théorisation, d’expérimentation, de vérification a permis des avancées considérables dans tous les domaines, les acquis doivent être défendus et le travail poursuivi.
De ce travail comment distinguer ce qui serait scientifique de ce qui ne le serait pas, la science dure de la molle, la science vraie de la simple discipline, la vérité de l’opinion.
Il faut éviter le manichéisme qui peut conduire à déclasser le darwinisme au gré de la force des groupes de pressions.
Qu’il y ait plus de certitudes en mathématiques et en physique qu’en économie ou en ethnologie est bien évident, qu’on ne puisse résoudre les crises du moment comme une équation du second degré l’est tout autant.
Les sciences établies dans leur mission d’élucidation de l’ordonnancement de l’univers, sont aussi truffées de conjectures qui par définition ne sont pas vérifiées mais seulement non contestées ou non encore contestées, tout était parfait pour la gravitation newtonienne jusqu’à la relativité générale. Leur deuxième mission tout autant scientifique, de modification des éléments naturels est plus simple par définition aussi, parce qu’il s’agit de créations.
Essentiellement, les relations d’échange de production entre humains, qui font les systèmes économiques, sont des créations humaines seulement subordonnées aux conditions naturelles, tout comme les créations scientifiques. Il n’y a donc de conjectures que parce que le fil historique complexe n’est plus visible.
Il y a donc en économie un travail de décryptage de la réalité historique et contemporaine qui ne peut être laissé à la seule appréciation du « café du commerce », la nature de ce travail est scientifique. Que ce travail soit perturbé par les choix sociétaux des chercheurs en économie est bien évident, la conclusion souhaitée peut influencer l’analyse des résultats. Mais les recherches des astronomes l’ont aussi été par la vision des églises au moyen âge.
Au centre de la chose économique, la valeur des biens et services a fait l’objet de bien des travaux et d’autant de polémiques pourtant, sous des angles différents, Adam Smith au 18ème siècle, David Ricardo et Karl Marx au 19ème et Jean Fourastié au 20ème ont établi que les biens et services valaient, au-delà du temps court, le poids du travail nécessaire à leur production. Toutes les comptabilités nationales et toutes les entreprises en ont adopté le principe au travers de la notion de valeur ajoutée. Et pourtant nous assistons depuis la fin du 19ème siècle à toutes sortes de remises en cause et aujourd’hui les thèses subjectivistes ont pris le dessus en ne retenant que les notions de rareté et d’utilité qui ont bien sûr leur influence mais qui sont insuffisantes pour expliquer la valeur. En effet quelque soit l’abondance ou l’utilité aucune entreprise ne peut durablement vendre en dessous du coût de ses facteurs de production, travail, consommations intermédiaires et amortissement des équipements ces deux derniers éléments étant eux-mêmes le fruit du travail d’autres entreprises. C’est vérifié par la sanction de la faillite.
Précisément, les économistes walrassiens, les tenants des seules utilité marginale et rareté, en ayant mathématisé à outrance leurs modèles ont tenté dans les années trente de se faire certifier « scientifique», leur travail n’est pas dénué de raison, mais exclure le travail de la formation de la valeur les prive d’un label qui n’est cependant pas une table biblique.
Ainsi un aspect fondamentalement scientifique concernant la valeur est aujourd’hui rendu inaudible comme la théorie darwiniste pourrait le devenir si les groupes de pression en avaient aussi la force.
Pour autant tout ce qui se dit en économie ne relève pas de la science, l’idéologie a sa responsabilité mais la complexité a aussi la sienne. Et ce n’est pas parce qu’il est impossible de réellement mathématiser l’utilité que le phénomène n’existe pas, les tentatives d’approche sont donc utiles, mais les conclusions forcément éloignées de la réalité.
Cependant de nombreuses questions économiques ont été traitées de manière scientifique, on ne discute plus le tableau des entrées-sorties de Quesnay et Leontieff, la valeur ajoutée comptable même si l’utilité des biens concernés est contestable est un apport de nature scientifique, la sommation des valeurs ajoutées en produit intérieur brut l’est aussi ainsi que nombre de corrections qui lui sont apportées. Bien d’autres thèmes sont traités avec la méthodologie scientifique et il faut rendre hommage aux travaux de l’INSEE et des laboratoires universitaires dont les résultats ne sont pas bien sûr complètement vérifiables. Le traitement de la hausse des prix se fait par enquêtes forcément partielles qui sont présumées représenter l’ensemble de l’économie, il est impensable de collecter tous les mouvements d’étiquettes dans les magasins bien entendu, mais l’approximation n’enlève rien au caractère scientifique de la mesure ou alors il faut aussi douter des vitesses réelles des photons dont seulement une infime partie a été mesurée!
Par contre de nombreuses questions n’étant pas encore traitées scientifiquement, notamment le fonctionnement de la banque, la notion de financement, c’est ce déficit qui fait place à une multitude d’élucubrations et au vacarme dont rien ne ressort.
L’économie souffre plutôt d’une insuffisance de traitement scientifique, qu’il ne faut effectivement pas confondre avec la mathématisation d’hypothèses erronées, prétendre que tout n’y est que question d’opinion laisse le champ totalement ouvert aux groupes de pression qui s’efforcent de créer l’opinion dominante.
Est-ce à dire que scientifiquement il n’y aurait qu’une solution à la problématique économique? La simple équation du second degré en ayant déjà généralement deux c’est donc avec la connaissance scientifique des choses établies que les choix sociétaux doivent s’opérer et il n’y a bien entendu pas que deux choix possibles.
C’est tout l’enjeu de l’appropriation par les citoyens de la chose économique au travers d’une multitude de lieux de réflexion.
Jean-Pierre Beux.
Si l’impôt est une façon de partager, de répartir les richesses, le don serait-il de nature à le remplacer ?
L’impôt et la cotisation actes régaliens dont on ne sait si le consentement à les acquitter est accepté ou subi, permettent la dépense publique. Ces prélèvements obligatoires constituent le paiement des services communs et une répartition sociale des richesses.
Si c’est l’acceptation qui prévaut, par un accès de citoyenneté, peut-on imaginer que chacun contribue, selon sa libre appréciation, par un don au pot commun?
Déjà en fiscalité française, le don à des œuvres est partiellement converti en impôt, le contribuable décide alors de l’affectation de son don. Ce principe élargi peut-il conduire à l’élaboration des budgets par les citoyens ?
Enfin, le don est-il l’exutoire de la conscience d’avoir trop perçu ?
Quelques innovateurs proposent de remplacer l’impôt obligatoire par le don volontaire….. mais l’homme est-il digne d’un don ?
Pas si nouveau le crédit à la consommation, mais ses formes nouvelles avec une facilité déconcertante d’accès, constituent un risque pour le contractant et une source d’affaires pour les banques. Les crédits renouvelables, les cartes de crédit sont des supports extrêmement tentants qui sont parfois présentés comme des substituts au revenu et cette pratique peut comporter au niveau économique global un risque de crise financière au même titre que les fameux « subprime » impliqués dans le déclenchement de la crise financière en cours depuis 2008.
Les taux et surtout les pénalités sont-ils usuraires ?
On se posera la question de savoir si le crédit à la consommation est un véritable prêt, quelles en sont les sources de financement.
On examinera l’impact de ces crédits sur l’activité économique.
Enfin, les comportements individuels en la matière conduisent-ils à un trait de société durable?
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